Critique avec Spoiler !
Alien, le Huitième Passager (1979), réalisé par Ridley Scott
Alien, le Huitième Passager est un film qu’on ne présente plus ! Un véritable monument de la science-fiction qui a laissé derrière lui un héritage qui fascine encore aujourd’hui des millions de cinéphiles. C’est avec honneur que j’ai choisi ce film pour ma première critique.
Alien, la naissance d’un mythe
Alien, c’est tout d’abord les débuts de l’un des plus grands monstres de l’Histoire du cinéma, le Xénomorphe ! Une sombre créature de plus de deux mètres avec deux mâchoires, des tubes dorsaux, des dents et griffes acérées, une longue queue pointue et de l’acide en guise de sang. C’est à l’imagination de l’artiste suisse H.R Giger, assez inspiré par Lovecraft, que l’on doit sa conception.
Autour de ce monstre emblématique, l’histoire d’Alien a su créer une véritable mythologie biologique. Il y a dans un premier temps un œuf produisant une forme de vie arachnide qui s’accroche au visage d’un hôte. Elle lui injecte alors un embryon dans le corps tout en l’alimentant en oxygène pendant une période de coma. Puis le « facehugger » meurt et le parasite à l’intérieur de la victime s’extirpe de sa cage thoracique peu après son réveil, la tuant dans d’atroces souffrances. Enfin, le « chestbuster » mue pour devenir un Xénomorphe, le parfait organisme. Rares étaient les films de science-fiction sortis avant Alien qui portaient autant d’attention au fonctionnement biologique des extraterrestres. Les deux premières adaptations du roman L’Invasion des Profanateurs l’avaient fait mais il ne s’agissait pas de films originaux.
Cependant, la mythologie d’Alien s’étend au-delà sa créature. Il y a par exemple un mystère autour du Space Jockey fossilisé, l’introduction d’une compagnie véreuse, un twist sur la présence d’un androïde au sein de l’équipage… Si d’un côté le scénario est simple et soulève un peu trop d’interrogations, d’un autre, tous ces éléments serviront d’ébauche pour les suites, préquels, spin-off ou encore jeux-vidéos qui développeront l’univers de Ridley Scott. Grâce à ses mystères et à ses thématiques SF, Alien est en effet le point de départ d’une franchise qui marquera la culture populaire.
Alien, un film de science-fiction immersif
Une grande référence visuelle du cinéma des années 70
Alien est à la fois un excellent film de science-fiction et un très bon film d’épouvante. Pour le côté SF, Ridley Scott a su utiliser les moyens de l’époque pour proposer une œuvre immersive. Cette immersion repose avant tout par l’esthétique. Le film était très clairement en avance sur son époque et utilise des effets pratiques réalistes. Je pense notamment à la maquette du Nostromo, à l’épave du vaisseau extraterrestre, à la représentation des robots ou encore à la créature sous ses différentes formes. La seule séquence ayant un peu vieilli -celle où la créature est expulsée dans l’espace avec un harpon- ne dure que quelques secondes.
En plus des magnifiques effets spéciaux (récompensés aux Oscars), le film bénéficie d’une direction artistique soignée et très inspirée. Les décors à l’intérieur du Nostromo ont ainsi un aspect assez industriel qu’aujourd’hui nous pourrions qualifier de rétrofuturiste. Ce design correspond en tout point à la fonctionnalité du vaisseau dans le scénario : un cargo commercial. Les décors de l’épave extraterrestre, eux, présentent un aspect biomécanique / organique, proche de Lovecraft.
La photographie a elle aussi aspect immersif. Il faut préciser qu’Alien est un long-métrage dans lequel le réalisateur prend son temps. Il s’attarde en effet sur ce qui est nécessaire pour que le spectateur se sente inclus dans l’espace filmé. Cet objectif est d’ailleurs fondamental dans un film à huis clos. On peut ainsi citer deux scène filmées de manière particulièrement immersive. La première nous fait visiter, en guise d’introduction, l’intérieur du Nostromo jusqu’à la chambre d’hypersommeil. Cela nous permet de nous familiariser d’entrée de jeu avec le lieu principal du film. La seconde scène est celle où l’équipage découvre une forme de vie fossilisée. Une séquence filmée de manière à nous surprendre et à nous faire ressentir le gigantisme du vaisseau exploré.
Quand le son est au service de l’esthétique
La sonorité du film accompagne particulièrement bien les éléments visuels précédemment cités. Le son met notamment en valeur les décors, par exemple à travers les bruits des machines. La musique (pas assez mentionnée) composée par Jerry Goldsmith a d’ailleurs elle-même des notes très mécaniques. Ce mariage entre le son et le visuel permet une immersion supplémentaire et fait même monter la pression d’un cran. Je pense notamment aux scènes où le Nostromo entre en processus de destruction. Dans celles-ci, le son devient hystérique et sert de complément aux effets de lumière. Cela donne des flashs en guise d’alarme visuelle, complétés par des sons simulant une alarme sonore, rendant les scènes particulièrement riches en adrénaline, avec un effet quasiment épileptique.
Alien, un film horrifique toujours aussi efficace
Suspense, angoisse et tension… dans l’espace, personne ne vous entend crier !
Bien que Ridley Scott prenne son temps pendant la première moitié du film, il y a une forme d’effet crescendo où la tension monte pas à pas sans jamais redescendre. Cela permet à Alien de glisser doucement mais sûrement vers l’horreur. Un côté horrifique particulièrement bien modelé ! Là aussi, la caméra de Ridley Scott joue un rôle important, en nous proposant par exemple des plans rapprochés pour nous montrer la peur ou l’agonie des personnages. Il y a également quelques scènes en prise de vue subjective pour renforcer notre plongée dans l’horreur. N’oublions pas non plus l’utilisation du clair-obscur qui rajoute une couche de noirceur.
Mais ce qui rend l’atmosphère d’Alien si anxiogène, c’est la manière dont le suspense exploite à la fois la créature et la claustrophobie des spectateurs. Le Xénomorphe est un monstre terrifiant, pourtant, il n’est pas tant que cela présent à l’écran. Ce qui est le plus effrayant, c’est le sentiment d’omniprésence de la créature. En effet, on sait qu’elle est là, mais on ne sait pas quand elle va surgir. C’est assez paradoxal, car même sans être visible, l’alien nous angoisse par sa présence hors caméra, preuve d’une ambiance bien maîtrisée. La scène montrant Dallas explorant les conduits d’aération illustre notamment ce propos, il s’agit d’ailleurs d’un des jumpscares les plus réussis du cinéma d’horreur.
Il faut souligner que le réalisateur joue sur deux tableaux : il montre et suggère. Le film est en effet parfois démonstratif, voire viscéral, comme lors de la mort sanglante de Kane ou la décapitation d’Ahs. Et il est d’autres fois suggestif comme lors du décès de Lambert. Cet aspect suggestif a même un côté symbolique quasiment sexuel, confirmé par les créateurs du film. En tout cas, Ridley Scott jongle avec les deux procédés et utilise chacun au bon moment.
Une contribution des acteurs solide mais limitée
Alien dispose d’un bon casting. En tant que metteur en scène, Ridley Scott a choisi de pousser les acteurs dans leur retranchement en essayant de capturer des moments d’authenticité face à la créature. Ainsi, selon la légende, aucun n’était au courant de la conclusion de la scène du chestbuster. Personnellement, j’ai trouvé que quatre acteurs ont permis une montée en tension dans plusieurs scènes. John Hurt parce qu’il nous offre une mort absolument culte. Ian Holm, pour son rôle d’antagoniste. Veronica Cartwright parce que c’est l’actrice du casting qui incarne le plus la peur et le désespoir. Enfin, Sigourney Weaver qui est dans la peau du personnage de sa vie. L’actrice est absolument géniale dans le rôle du lieutenant Ripley.
Ripley est d’ailleurs le seul personnage pour lequel on s’attache, ce premier opus n’étant pas orienté développement des protagonistes. En effet, l’une des rares critiques que l’on pourrait faire à Alien, est le manque de charisme des personnages en dehors de son héroïne. Ainsi, la performance des acteurs a une certaine limite sur l’aspect horrifique du film, la mort de leurs personnages ayant peu d’impact émotionnel. Pire encore, lors des deux premières morts du film, les protagonistes eux-mêmes semblent peu atteints par la perte de leurs coéquipiers.
Résumé : Alien, le Huitième Passager n’est pas seulement mon film de science-fiction préféré, c’est aussi l’un de mes films préférés ! Il s’agit d’un classique incontournable du cinéma, pour ses aspects esthétiques, sa mise en scène horrifique et son l’influence sur le genre.
10/10